Depuis plusieurs années, la question de l’encadrement des loyers fait débat en France. Alors que certains y voient une solution pour lutter contre la flambée des prix et favoriser l’accès au logement pour tous, d’autres estiment que cette mesure peut avoir des effets pervers sur le marché immobilier. Cet article se propose de faire le point sur ce dispositif, son historique, ses objectifs et ses résultats.
Le principe de l’encadrement des loyers
L’encadrement des loyers consiste à plafonner les prix au mètre carré pour les locations du parc privé dans certaines zones considérées comme tendues, c’est-à-dire où la demande de logements est nettement supérieure à l’offre. L’idée est de protéger les locataires contre les hausses excessives et d’éviter les abus de la part des propriétaires. Les loyers sont ainsi encadrés lors de la première location d’un logement ou lors du renouvellement du bail.
Historique du dispositif en France
L’encadrement des loyers a été instauré pour la première fois en France lors de la Première Guerre mondiale, avant d’être progressivement supprimé en 1948. Il a ensuite été réintroduit sous différentes formes à partir des années 1970, notamment avec la loi Quillot (1982) puis la loi Mermaz-Malandain (1989).
En 2012, le gouvernement de François Hollande met en place un nouvel encadrement des loyers dans le cadre de la loi ALUR (Accès au Logement et à un Urbanisme Rénové). Ce dispositif a toutefois été annulé par le Conseil d’État en 2017, jugeant que l’encadrement devait être étendu à l’ensemble de l’agglomération parisienne et non pas seulement aux communes volontaires.
En 2019, la loi ELAN (Évolution du Logement, de l’Aménagement et du Numérique) a réintroduit l’encadrement des loyers à titre expérimental pour une durée de cinq ans dans certaines villes volontaires. À ce jour, seules Paris et Lille ont mis en place ce dispositif.
Les objectifs poursuivis
Plusieurs objectifs sont visés par les partisans de l’encadrement des loyers :
- Lutter contre la flambée des prix : dans les zones tendues, les loyers peuvent atteindre des niveaux très élevés, rendant difficile l’accès au logement pour une partie de la population;
- Réguler le marché immobilier : en encadrant les loyers, on espère éviter les bulles spéculatives et stabiliser les prix;
- Favoriser la mixité sociale : en limitant les écarts de loyers entre quartiers ou communes, on cherche à favoriser la diversité des profils de locataires et à éviter la gentrification des centres-villes;
- Protéger les locataires : l’encadrement des loyers vise également à garantir un certain niveau de protection aux locataires contre les hausses abusives et les discriminations.
Les effets constatés sur le marché immobilier
Si l’encadrement des loyers a pu avoir des effets positifs dans certaines villes, les résultats sont contrastés. Plusieurs études ont montré que le dispositif pouvait avoir des effets pervers :
- Un manque d’attractivité pour les investisseurs : face à la limitation de leurs revenus locatifs, certains propriétaires peuvent être tentés de ne pas louer leur bien ou de le vendre;
- Une rénovation moins importante des logements : faute de rentabilité suffisante, les propriétaires pourraient être moins enclins à entreprendre des travaux d’amélioration;
- Un effet d’aubaine pour les locataires déjà en place : l’encadrement des loyers pourrait inciter certains locataires à rester plus longtemps dans leur logement, limitant ainsi la mobilité résidentielle et l’accès au logement pour d’autres ménages.
Cependant, selon une étude réalisée par l’Observatoire des Loyers de l’Agglomération Parisienne (OLAP) en 2020, l’encadrement des loyers aurait permis de limiter la hausse des loyers à Paris entre 2015 et 2019, tout en augmentant légèrement l’offre de logements. Cette étude souligne également que les effets du dispositif sont difficiles à isoler, car ils peuvent être influencés par de nombreux autres facteurs (conjuncture économique, politiques locales, etc.).
En somme, l’encadrement des loyers en France reste un dispositif controversé aux effets contrastés. Si certains résultats semblent encourageants, notamment en termes de régulation des prix et de protection des locataires, d’autres aspects méritent d’être approfondis pour évaluer réellement son impact sur le marché immobilier et l’accès au logement pour tous.